
Les tubercules et feuilles de manioc, lorsqu’elles sont consommées crues, présentent un risque de toxicité avéré. En effet, ces organes végétaux contiennent des glycosides cyanogéniques, principalement la linamarine et la lotaustraline, susceptibles de libérer du cyanure d’hydrogène (HCN) sous certaines conditions enzymatiques et physicochimiques.
Contrairement à une idée fréquemment relayée, les tubercules de manioc crues ne contiennent pas de cyanure d’hydrogène sous forme libre, mais des précurseurs inoffensifs tant qu’ils ne sont pas hydrolysés.
La libération de cyanure résulte d’une hydrolyse enzymatique en deux étapes catalysées par les enzymes appelées bêta-glucosidases, aboutissant d’abord à la formation de cyanohydrine instable, laquelle se décomposent en cyanure d’hydrogène et en acétone. Ce processus débute dès la mastication et se poursuit tout au long de la digestion.
Une cuisson rigoureuse ou une fermentation appropriée dénature ces enzymes, réduisant ainsi le risque d’intoxication. Néanmoins, certains glycosides cyanogéniques restent présents après traitement thermique ou fermentaire et peuvent redevenir toxiques en présence d’enzymes alimentaires compatibles, d’où l’importance de choisir des accompagnements adaptés et de privilégier une consommation modérée.
- Cardoso, A.P., Mirione, E., Ernesto, M., Massaza, F., Cliff, J., Haque, M.R., Bradbury, J.H. (2005). Processing of cassava roots to remove cyanogens. Journal of Food Composition and Analysis, 18(5), 451–460. https://doi.org/10.1016/j.jfca.2004.06.005
- Ernesto, M., Cardoso, A.P., Nicala, D., Cliff, J., Bradbury, J.H. (2002). Persistent konzo and cyanide toxicity from cassava in northern Mozambique. Acta Tropica, 82(3), 357–362. https://doi.org/10.1016/S0001-706X(02)00045-6
- Poulton, J.E. (1990). Cyanogenesis in Plants. Plant Physiology, 94(2), 401–405. https://doi.org/10.1104/pp.94.2.401
- Nambisan, B. (2011). Strategies for elimination of cyanogens from cassava for reducing toxicity and improving food safety. Food and Chemical Toxicology, 49(3), 690–693. https://doi.org/10.1016/j.fct.2010.06.049
- WHO/FAO. (1991). Cyanogenic glycosides. Environmental Health Criteria 161. World Health Organization, Geneva.
Le lien avec le Konzo: à ce jour, aucune évidence mécanistique (mode d’action) n’a été publiée concernant l’implication du cyanure d’hydrogène issu de la consommation chronique de manioc dans la pathologie du Konzo. Cependant, plusieurs travaux scientifiques mettent en évidence l’interaction complexe entre l’alimentation, le microbiote intestinal et les facteurs environnementaux dans le développement de cette maladie.
Ainsi, le Konzo semble non seulement dépendre de la consommation de certaines variétés spécifiques de manioc, mais aussi de l’alimentation en général et de divers facteurs environnementaux qui contribuent à son apparition et à son évolution.